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La Fédération peut seule donner satisfaction aux besoins et aux droits des classes laborieuses, résoudre le problème de l’accord du travail et du capital, celui de l’association, ceux de l’impôt, du crédit, de la propriété, du salaire, etc. L’expérience a démontré que la loi de charité, le précepte de bienfaisance, et toutes les institutions de la philanthropie sont ici radicalement impuissantes. Reste donc le recours à la Justice, souveraine en économie politique aussi bien qu’en gouvernement ; reste le contrat synallagmatique et commutatif. Or, que nous dit, que nous commande la justice, exprimée par le contrat ? De remplacer le principe du monopole par celui de mutualité dans tous les cas où il s’agit de garantie industrielle, de crédit, d’assurance, de service public : chose facile en régime fédératif, mais qui répugne aux gouvernements unitaires. Ainsi, la réduction et la péréquation de l’impôt ne peuvent être obtenues sous un pouvoir à haute pression, puisque pour réduire et égaliser l’impôt, il faudrait commencer par le décentraliser ; ainsi la dette publique ne se liquidera jamais, elle s’augmentera toujours plus ou moins rapidement, aussi bien sous une république unitaire que sous une monarchie bourgeoise ; ainsi le débouché extérieur, qui devrait apporter à la nation un surcroît de richesse, est annulé par la restriction du marché intérieur, restriction causée par l’énormité des taxes[1] ; ainsi les valeurs,

  1. La France produit, année moyenne, 30 à 35 millions d’hectolitres de vins. Cette quantité, jointe à celle des cidres et des bières, ne dépasserait pas de beaucoup la consommation de ses trente-huit millions d’habitants, s’il était permis à tout le monde d’aller à Corinthe, c’est-à-dire de boire sa quote-part de vin, de bière ou de cidre. Donc quoi bon chercher au dehors un débouché que nous avons en nous-mêmes Mais il y a pis : le débouché intérieur fermé en quelque sorte par les taxes de l’État, par les frais de transport, les octrois, etc., on a cru s’en procurer un autre à l’étranger. Mais l’étranger n’achète que des vins de luxe, il repousse les vins ordinaires, dont il se soucie peu ou qui lui reviendraient trop cher : si bien que le producteur reste avec sa marchandise, sans acheteur ni au dedans ni au dehors. La Gironde avait compté sur le traité de commerce avec l’Angleterre pour le placement de ses vins ; de fortes quantités ont été expédiées à Londres : elles restent invendues dans les docks. Cherchez, et vous verrez que cette anomalie, tant de fois signalée, tient à une série de causes qui toutes se résolvent en une seule : le système unitaire.
    ...............................(Voir ma Théorie de l’impôt, 1 vol., 1861.)