celui que j’interpelle soit indirectement désigné par moi comme un écrivain vénal : il s’agit de tout autre chose. En ce qui me concerne, je le répète, je ne crois pas aux subventions, par l’excellente raison que, si le fait était vrai, il se dissimulerait, et que je ne pourrais le dénoncer sans m’exposer à une poursuite en calomnie. Quant aux décorés, je n’en connais aucun. Tout ce que je puis dire, c’est que le reproche a été articulé publiquement, qu’aucune protestation ne s’est élevée ; que, parmi les décorés, les uns portent leur décoration, les autres s’en abstiennent par une pure considération de parti ; que tous, du reste, n’ont fait aucune difficulté de l’accepter. D’après ma manière de voir c’est là une chose grave. Tout particulier a le droit de recevoir une décoration, voire même une pension, d’un souverain étranger. Mais le journal est une fonction quasi-publique, le journaliste une sorte d’écrivain juré : une preuve, c’est l’autorisation qu’il doit obtenir et le cautionnement qu’on exige de lui ; c’est surtout la confiance implicite des lecteurs. Dans la rigueur du droit, un journaliste ne doit recevoir ni distinction honorifique ni récompense pécuniaire de qui que ce soit, pas même du gouvernement de son pays. Il ne doit connaître d’autre faveur que celle de l’opinion, d’autre argent que celui de ses abonnés. C’est une question de foi publique, non de moralité privée ; et c’est en ce sens que je continue mes interpellations, sans acception ni exception de personne.
M. Guéroult a bien voulu me consacrer dans son journal deux ou trois articles. En homme qui sait son métier, il a commencé par me plaisanter sur la thèse et l’antithèse,