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taient faits pour gouverner. Ces gens-là organisaient un 20 juin, un 10 août, un 31 mai, donnaient une représentation ; quant au pouvoir, ils n’y entraient pas. La Terreur elle-même, qui dura quatorze mois, la Terreur fut œuvre de conservation, œuvre d’ordre.

Vous ne prendrez pas Napoléon, malgré sa popularité, pour un démagogue. Sieyès et les Anciens, vrais auteurs du coup d’état de brumaire, durent compter avec le général sans doute : puisque la bourgeoisie, en 99 comme en 51, appelait l’armée à son aide, elle acceptait le gouvernement militaire. Mais Bonaparte, premier consul et empereur, ne s’en fit pas moins bourgeois tant qu’il put, conservateur et restaurateur de tout ce qui lui semblait utile à l’ordre : s’il déplut à la fin aux bourgeois, j’en ai dit la cause.

De 1814 à 1830, comme de 1830 à 1848, le gouvernement, malgré l’opposition qu’il se crée, n’est-il pas toujours bourgeois, aussi bourgeois que l’opposition ? Quelle différence réelle entre MM. Decazes, Ravez, Mounier, de Villèle, de Martignac, et MM. Casimir Périer, Laffitte, Dupont (de l’Eure), Guizot, Thiers ? et plus tard, entre les hommes du quoique et ceux du parce que ? et maintenant entre la fusion et la non-fusion ? Quand, après 1830, le parti légitimiste reproche à Louis-Philippe de n’avoir pas usé de son crédit pour faire accepter à la nation l’holocauste volontaire de Charles X et du duc d’Angoulême, et pour rétablir Henri V sur le trône de ses pères, ne font-ils pas, par cela même, amende honorable de l’article 14 et des fatales ordonnances, acte d’adhésion à la Révolution ?… Quelle différence encore entre l’opposition dite dynastique et la république tempérée, présentement en train de se rallier, comme les légitimistes se rallient aux orléanistes ?

Entre ces nuances, il y a des griefs domestiques, des