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Les actes en sont connus : se baigner dans l’onde lustrale, passer par les flammes, se flageller, se couvrir de cendre, porter le cilice, aller nu-pieds, jeûner, veiller, garder la retraite, réciter des psaumes, etc. N’en rions pas : ce fut la première manifestation de la Justice au point de vue de la réparation du péché ; et c’est encore aujourd’hui tout ce qu’en savent nos moralistes théologiens et nos législateurs. Dans cette pénitencerie, dont le principe est que l’homme n’a de pardon à demander qu’à Dieu, de satisfaction à donner qu’à Dieu, il y a sans doute une haute idée de la dignité humaine ; mais il y a en même temps une grande cause de démoralisation. En fait, c’est bien envers la famille et la société que le pécheur est coupable ; c’est à elles qu’il fait tort : l’envoyer satisfaire aux dieux, c’est prêcher le mépris de toutes deux.

Actuellement la symbolique est usée ; toutes ces macérations, dont les frères déchaussés et mendiants nous offrent en plein Paris le spectacle, est superstition et indignité. Le vrai pénitent, comme dit Jésus-Christ, se lave le visage, s’habille avec décence, cache aux regards la peau et le poil de ses jambes, se discipline par le travail, l’étude, la modestie, le renoncement temporaire à son sens privé, l’empressement à servir, l’accomplissement des labeurs répugnants et pénibles, la pratique assidue du dévouement. Le vrai pénitent est un héros ; chaque instant de sa pénitence fait dire de lui : Heureuse faute ! Il irait jusqu’à préférer, sa réparation finie, de rester toute sa vie pénitent, si le grand combat de la société n’exigeait qu’il reprenne son rang parmi ses frères. C’est pourquoi, dit encore Jésus-Christ, il y a plus de joie dans le ciel pour un pécheur pénitent que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de pénitence.

Que si, par supposition, le coupable se montre obstiné dans le crime, contempteur des hommes et décidément