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publiques, comme de la femme en domesticité, une victime de la luxure : cela peut changer, et il est nécessaire que cela change.

D. — Aucune industrie, aucun art, ne vous semble-t-il plus spécialement dévolu à la femme ?

R. — C’est toujours, en termes voilés, reproduire la question de l’égalité politique et sociale des sexes, et protester contre le titre de ménagère qui, mieux que celui de matrone, exprime la vocation de la femme.

La femme peut se rendre utile en une foule de choses, et elle le doit ; mais, de même que sa production littéraire se réduit toujours à un roman intime, dont toute la valeur est de servir, par l’amour et le sentiment, à la vulgarisation de la Justice ; de même sa production industrielle se ramène en dernière analyse à des travaux de ménage : elle ne sortira jamais de ce cercle.

L’homme est travailleur, la femme ménagère : de quoi se plaindrait-elle ? Plus la Justice en se développant nivellera les conditions et les fortunes, plus ils se verront élevés tous deux, celui-là par le travail, celle-ci par le ménage. Quand l’homme repousse toute exploitation et patronat, la femme réclamerait-elle pour son service une valetaille ? Ou la prendre ? Les deux sexes naissent en nombre égal : est-ce clair ?

Le ménage est la pleine manifestation de la femme. L’homme, hors mariage, peut se passer de domicile : au collége, à la caserne, à la table d’hôte, à l’hôtel garni, il se retrouve toujours et se montre tout entier ; la promiscuité ne l’atteint pas. Pour la femme, le ménage est une nécessité d’honneur, disons même de toilette. C’est chez elle que la femme est jugée ; ailleurs elle passe, on ne la voit pas. Fille, mère de famille, le ménage est son triomphe ou sa condamnation. Qui donc lui rangera son nid, si ce n’est elle-même ? Faudra-t-il à cette odalisque intendant, livrée, femmes, grooms, des nains et des singes ?… Nous ne sommes plus en démocratie, nous ne sommes plus en mariage ; nous retombons en féodalité et concubinage.

D. — En quoi consiste la liberté pour la femme ?