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Juris humani et divini communicatio, que M. Ernest Legouvé traduit, avec moins de pompe, École de perfectionnement mutuel.

Dans cette religion de la famille on peut dire que l’appui ou le père est le prêtre ; la femme, l’idole ; les enfants, le peuple. Il y a sept initiations : les noces, le foyer ou la table, la naissance, la puberté, le conseil de famille, le testament et les funérailles. Tous sont dans la main du père, nourris de son travail, protégés par son épée, soumis à son gouvernement, ressortissants de son tribunal, héritiers et continuateurs de sa pensée. La Justice est là tout entière, organisée et armée : avec le père, la femme et les enfants, elle a trouvé son appareil, qui ne fera plus que s’étendre par le croisement des familles et le développement de la cité. L’autorité est là aussi, mais temporaire : à la majorité de l’enfant, le père ne conserve plus vis-à-vis de lui qu’un titre honorifique. La religion, enfin, se conserve là : tandis que partout ailleurs l’interprétation des symboles, l’habitude de la science et l’exercice du raisonnement l’affaiblissent sans cesse, elle subsiste dans la famille, s’y condense, et ne redoute aucune attaque : la révélation, tout idéale, de la femme, ne pouvant ni s’analyser, ni se nier, ni s’éteindre.

D. — Comment, rachetée par cette religion dans laquelle il est facile de reconnaître l’embryon de toutes celles qui ont suivi, la femme reste-t-elle néanmoins subordonnée à l’homme ?

R. — C’est précisément que la femme est un objet de culte, et qu’il n’y a pas de commune mesure entre la force et l’idéal. Sous aucun rapport la femme n’entre en comparaison avec l’homme : industrieuse, philosophe ou fonctionnaire publique, elle ne peut ; déesse, elle ne doit ; elle est toujours trop haut ou trop bas. L’homme mourra pour elle, comme il meurt pour sa foi et ses dieux ; mais il gardera le commandement et la responsabilité.

D. — Pourquoi le mariage est-il des deux parts monogame ?

R. — Parce que la conscience est commune entre les époux, et qu’elle ne peut, sans se dissoudre, admettre un tiers participant. Conscience pour conscience, comme amour pour amour, vie pour vie, âme pour âme, liberté pour liberté : telle est la