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plus sensible et au plus compatissant des conjoints. L’économie domestique fournit un nouveau motif : l’homme devant produire pour toute la famille, il importait de lui laisser l’entière liberté de ses mouvements. Mais la théorie du mariage nous donne la raison supérieure, savoir : l’éducation des enfants.

Le nouvel individu ne peut pas rester dans une immoralité animique jusqu’à l’époque où il recevra par l’amour la révélation de la Justice : l’ordre de la famille, la dignité de l’enfance, exigent que cette jeune conscience sorte de l’inertie par une initiation préparatoire. Or, cette première initiation du droit et du devoir, c’est la mère qui, sous la sanction paternelle, la donne.

Ce que la femme, le sexe gracieux, reçoit par le mariage du sexe fort et qu’elle idéalise à mesure, elle l’enseigne à son enfant ; elle devient à son tour, par l’amour maternel, éducatrice du nouvel homme ; le père, par son autorité, apparaît comme garant et gardien.

Ôtez le mariage, la mère reste avec sa tendresse, mais sans autorité, sans droit. D’elle à son fils, il n’y a plus de Justice ; il y a bâtardise, un premier pas en arrière, un retour à l’immoralité.

Tel est donc, selon l’ordre de la nature, le développement organique de la Justice. L’appareil juridique existe, il fonctionne, mais son action ne dépasse pas la limite des époux, qui est celle de l’idéal. Par la génération, l’idée du droit prend un premier accroissement : d’abord, dans le cœur du père. La paternité est le moment décisif de la vie morale. C’est alors que l’homme s’assure dans sa dignité, conçoit la Justice comme son vrai bien, comme sa gloire, le monument de son existence, l’héritage le plus précieux qu’il puisse laisser à ses enfants. Son nom, un nom sans tache, à faire passer comme un titre de no-