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ceux que l’auteur aime et qu’il présente comme modèles, et ceux qu’il n’aime pas. Il ne faut pas demander si les premiers sont peints à leur avantage, les autres chargés. Eh bien ! de ces deux catégories de mâles celle qui a le moins de valeur est en général celle des amis de cœur de l’écrivain, et la raison en est simple : conçus fatalement d’après le type femmelin, ils ont perdu, au moral comme au physique, leur masculinité, tandis que les autres, précisément parce que l’auteur ne les a point flattés, la retiennent. Je prie ceux de mes lecteurs qui auraient la curiosité de vérifier le fait, de revoir les personnages de Bénédict, sir Ralph, Sténio, Téverino, Leone Leoni, Bustamente, Jacques, Bernard de Mauprat après sa conversion, l’amant de Quintilie, etc. Vertueux ou coupables, tous ces êtres sont de même nerf, artistes, bohèmes, braves et dévoués, cela va sans dire, et beaux diseurs ; mais, en fait, dépourvus de caractère, de sens moral et de sens commun.

À cette dépression systématique du sexe mâle, les femmes gagnent d’autant sans doute ? Il n’en est rien. Les femmes de Mme Sand sont, comme ses hommes, de deux catégories : émancipées, c’est-à-dire esprits forts, cœurs secs, natures bilieuses, hautaines, rudes à l’abordage, au demeurant peu chastes, bien que le mot revienne à chaque ligne ; non émancipées, c’est-à-dire lymphatiques ou sanguines, molles, lâches, bêtes et perfides. Comparez sous ce rapport Lélia, Quintilia, Edmée, Sylvia, avec Pulchérie, Fernande, Athénaïs, Joséphine de Frénays, Juliette, la comtesse dans Téverino, etc. Valentine et Indiana, types indécis, tiennent des unes et des autres. Mme Sand, j’en ai fait ailleurs l’observation, a la plus triste idée de son sexe ; hors les élues qu’elle crée à son image, elle le traite on ne peut plus mal. Elle fait dire à Sylvia, la stoïcienne, à propos de la fiancée de son frère :

« Elle a beau être aimable, elle aura beau être sincère et bonne : elle est femme, elle a été élevée par une femme ; elle sera lâche et menteuse, un peu seulement peut-être ; cela suffira pour te dégoûter. »

À force de chercher la liberté et l’amour, Mme Sand finit par perdre jusqu’à l’intelligence des choses morales : ainsi, dans