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tions, la médiocrité devenait la condition générale, et la supériorité de génie l’exception ?… — Ici encore la science vient démentir l’hypothèse. La division du travail et l’équilibre des fonctions sont les deux premières lois de l’organisation industrielle ; de ces deux lois il en naît une troisième, qui déboute irrévocablement la femme de ses prétentions, c’est la loi d’ascension aux grades, par laquelle tout individu mâle a pour devoir et pour fin de devenir, à son tour, une supériorité.

Voilà pour les principes : voyons le raisonnement.

On dit : Ce n’est pas le corps qui fait l’homme, c’est l’âme ; or les âmes sont égales : donc…

Mais la distinction ontologique de l’âme et du corps est le principe même sur lequel nous avons vu que s’étaient successivement établis, d’abord l’esclavage, puis le servage, aujourd’hui le salariat. Comment peut-on l’invoquer en faveur de la femme ?… Admettons-la, cependant, cette distinction ; accordons que le corps n’est rien pour l’homme, et que les âmes sont égales. En dernière analyse, l’âme ne peut être jugée que sur ses actes ; cela est élémentaire en droit. Si donc les actes de l’âme masculine, obtenus par l’intermédiaire du cerveau et des muscles, valent plus que les actes de l’âme féminine, l’égalité entre elles se réduit à une fiction de l’autre monde ; sur cette terre, elle est impossible.

On dit : Le progrès pour l’humanité consiste à triompher sans cesse de la matière par l’esprit : donc…

Eh bien ! qui triomphe le mieux de la matière, de l’homme ou de la femme ?

On dit enfin : Le progrès est à l’égalité : donc…

Oui, le progrès est à l’égalité entre sujets de même ordre et de constitution équivalente, que l’ignorance et la fatalité ont faits inégaux : ce qui veut dire que le progrès est à l’égalité de l’homme à l’homme, de la femme