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lois repoussent et que je ne réclame point, le concubinat reconnu, entouré d’un caractère légal, tel à peu près que l’avait fait l’empereur Auguste et que l’Église l’admit si longtemps : que serait-il arrivé de cette femme ? C’est qu’elle eût trouvé avec un compagnon honnête homme une famille d’adoption, des enfants, une part dans la considération publique, les égards du magistrat ; la société, la morale, la raison, la Justice, étaient satisfaites. Au lieu de cela, parce qu’elle a voulu trancher un nœud qui ne se pouvait défaire, la même femme est déclarée, de par la religion et les lois, d’un côté, pour ses nouvelles amours, libertine, adultère, prostituée ; de l’autre, pour sa tentative de remariage, bigame, faussaire, sacrilége. Sur quoi, deux années de prison, rupture des secondes comme des premières noces, abandon universel, flétrissure. À sa sortie de prison il ne lui reste qu’à se jeter à l’eau.

Au surplus, il est arrivé du concubinage comme de la prostitution : il n’a jamais cessé d’exister ; il grandit tous les jours parmi le peuple, qui ne comprenant du lien légitime que la dot, l’abandonne aux riches. On dirait que le cœur humain, trompé par sa religion, trompé par ses légistes, cherche dans les joies économiques de l’union concubinaire la restauration du mariage.

XLIV

L’Église, pudibonde et sévère, n’a donc voulu conserver que le sacrement : on a vu au chapitre précédent ce qu’entre ses mains le sacrement est devenu.

De même, selon l’Évangile, que la Justice, la liberté, la richesse, la science et la paix ne peuvent s’obtenir ici-bas et doivent être regardées comme des prérogatives de l’autre vie ; de même le pur et parfait amour est promis seulement pour le Ciel, là où l’on ne se marie plus, dit