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hors le cas d’adultère, la fait prostituée, et que celui qui épouse une femme divorcée est lui-même adultère. »

Faut-il tant de pénétration pour comprendre la pensée du fondateur ? Il prend en main la défense des femmes, livrées, par le privilége illimité de répudiation que la loi accordait à l’homme, à la brutalité des maris, et il pose une limite à un abus qui faisait dégénérer l’institution en promiscuité. Il restreignait, en un mot, le divorce au cas d’adultère : c’est ainsi que le comprirent les disciples immédiats, qui avaient vu et entendu Jésus, et l’Église grecque est là tout entière pour affirmer la vérité de cette tradition.

Mais Paul a aussi son évangile, plein de choses qui ne se trouvent pas dans l’évangile de Pierre, comme par exemple de rompre toute relation avec la société civile et de s’abstenir de ses tribunaux, malgré le mot si connu du Maître : Mon royaume n’est pas de ce monde. Jésus avait fait profession d’obéissance à l’autorité établie ; Paul prêche la sécession, la sédition. Jésus s’était montré indulgent pour les pécheurs ; Paul tranche du rigoriste. Sur tous les points il aspire à surpasser Jésus dans la morale et dans la gnose, il ne lui laisse que la messianité. À ceux qui lui font des objections sur son enseignement, dont certaines parties ne se trouvaient pas dans celui du Galiléen, il répond avec aigreur :

« Dieu a suscité le Maître, j’en conviens ; mais moi aussi il me suscitera par sa vertu » ; Deus verò et Dominum suscitavit ; et nos suscitabit per virtutem suam. — Tout m’est permis, mais tout ne me convient pas, et je ne relève d’aucune autorité.

« Oui, vous avez été faits membres (enfants) du Christ ; mais quoi ! est-ce qu’en vous reprenant au point où vous a laissés le Christ, je ferai de vous des bâtards ? » Tollens ergo membra Christi faciam membra meretricis ?

Passage qui prouve encore que Paul, à Corinthe aussi