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Carthage, décapité en 358, les martyrs recevoir dans leurs cachots la visite des sœurs, et, tout couverts du sang de leurs tortures, les embrasser en Jésus-Christ et Cupidon, au grand scandale du chaste évêque.

Je sais bien que l’Église dite orthodoxe décline la responsabilité de ces aberrations, qu’elle rejette sur l’hérésie. Mais vous avouerez, Monseigneur, que la pensée première de votre Église fut communiste, son idéal communiste, son administration communiste, ses repas, même communistes ; et quand j’ajoute que l’amour y fut aussi communiste, qu’il ne cessa de l’être que lorsque les repas et l’autorité furent sortis de l’indivision, je ne fais que tirer la conséquence du principe qui pendant la première période régit la secte, et rappeler une pratique dont la longue durée accuse l’universalité originelle.

Ainsi, ce n’est pas comme honteux que le christianisme condamne d’abord l’amour libre : le décret du premier concile, l’épître de Jude et l’Apocalypse le prouvent ; c’est uniquement comme incompatible avec la propriété, l’administration ecclésiastique, le respect du gouvernement. Le concile apostolique avait défendu le commerce avec les filles de Vénus en raison des viandes offertes à la déesse ; maintenant le chef de l’apostolat défend la communauté des amours par respect pour les mœurs de l’empire. À travers ces restrictions, on voit que le principe ne change pas : la vraie foi du chrétien est que l’amour, comme le travail et la propriété, doit être commun. Si Pierre et ses successeurs y dérogent, c’est affaire de police et de circonstance, qui ne change rien à l’esprit de l’Évangile et aux tendances de l’Église, n’affecte en rien l’essence du dogme.

XXXI

Avec Pierre et ses acolytes, nous voici donc arrivés au