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Tel est le considérant sous-entendu dans le texte des Actes, mais que le sens du décret suppose. Ce qui choque la religion du collége apostolique, soit faiblesse de sens moral, soit ménagement pour la coutume, c’est, quoi ? la dégradation de la femme ? non ; les licences de la Vénus vulgaire ? ils n’y pensent pas ; c’est la participation à l’idolâtrie, pour eux le plus capital des crimes. D’après le Décalogue et la tradition des prophètes, dont le Christ fermait la série, la défense de l’idolâtrie est absolue ; elle emporte la renonciation aux filles de joie. C’est ce que déclare le concile par son décret :

« Il a plu au Saint-Esprit et à nous, Visum est Spiritui Sancto et nobis, que vous vous absteniez des viandes immolées aux idoles, des boudins, civets (la loi de Moïse défendait de manger le sang, la chair des animaux étouffés ou cuite dans leur sang), et de la fornication : Ut abstineatis vos ab immolatis simulacrorum, et sanguine, et suffocato, et fornicatione. Ce que faisant vous serez sans reproche. Adieu. A quibus custodientes vos bene agetis. Valete. »

Singulier effet du préjugé : ces hommes, qui osaient rompre avec la foi d’Israël et reprendre leur prépuce, s’effrayent d’une vaine cérémonie polythéiste ; dans leur cervelle étroite, c’est la condamnation du boudin bénit qui emporte celle de la fornication. Les idolâtres ne faisaient pas l’amour à jeun ; le temple de Vénus servait aussi de restaurant : c’est par là qu’ils attaquent l’amour libre. Qu’est devenu le prophète de Nazareth ? Qu’aurait pensé sa haute intelligence en voyant ses légats, Pierre, Paul, Jacques, Jean et toute l’Église, gravement occupés de tels scrupules ?

XXX

Du moins, pensez-vous, en vertu de cette décision canonique, la femme va monter d’un grade : plus de courtisanes, plus de mercenaires, plus de ces femmes dont les