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d’affranchir la dignité humaine du double fatalisme de la chair et de l’idéal, mais de les faire servir conjointement à la consolidation de la Justice, tant au for intérieur qu’au for extérieur.

Poursuivons maintenant, et sans plus de digressions, nos recherches.

XII

Dans le principe, c’est surtout la femme qu’a en vue l’instituteur du mariage. Pour elle, la cérémonie nuptiale devient une consécration qui la rend sainte, sanctissima conjux, dit Virgile, inaccessible, à peine de sacrilége, à tout autre que son époux. La réciproque n’existe pas, du moins au même degré, pour le mari : nous l’avons vu par le droit de cuissage accordé par Moïse au maître de la fille esclave, droit reconnu par toute l’antiquité. Tandis que le commerce d’une femme de condition libre avec un esclave paraissait monstrueux et était puni du dernier supplice, l’homme jouissait d’une sorte de privilége à l’égard de la servante qu’il daignait honorer de sa faveur. Quia respexit humilitatem ancillæ suæ, dit la Vierge mère, favorite du Très-Haut, dans l’Évangile ; comme si le mariage intéressait la femme d’une tout autre manière que l’homme, et que du reste le droit de propriété couvrît pour celui-ci la mésalliance.

Aussi l’adultère de la femme et la séduction tentée à son égard ont-ils été partout l’objet d’une répression énergique.

« Que la séduction se garde d’approcher de la femme libre. Le déshonneur imprimé à la matrone, à la vierge, au fils de famille, n’est pas seulement une honte pour le toit domestique ; c’est une honte et un dommage pour l’état. Si le tribunal domestique, du mari ou du père, est trop long à venger cette injure, l’édile ira devant le peuple accuser la matrone coupable. Le séducteur sera dégradé par le censeur,