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de rester ensemble ; ce n’est pas là qu’est le mariage.

Je parle de cette constitution, bien autrement sérieuse, où tendent et dans laquelle se résolvent toutes les coutumes matrimoniales, constitution qui se définit en trois termes : Unité, Inviolabilité, Indissolubilité.

Nous verrons en effet que hors de là point de mariage. Qu’est-ce qui pousse l’humanité, en raison même de sa civilisation, à cette monogamie rigoureuse ? Comment la liberté, que nous avons vue briser sans cesse toute espèce de joug, va-t-elle au-devant de celui-là ? Est-il sûr que cette tendance, si généralement, si fortement accusée, soit conforme à la raison des personnes et des choses ? D’illustres philosophes, tels que Platon, le nient, et leur négation arrive juste dans l’histoire au moment de la plus grande civilisation, comme si au nom de la civilisation ils protestaient contre un préjugé de la barbarie et un reste de servitude. De nos jours, comme au temps de Platon et des empereurs, beaucoup protestent contre le mariage, auquel ils substituent l’amour libre, appelant de leurs vœux une liberté toujours plus grande, garantie par la communauté des enfants et des femmes. Que penser de ces opinions en sens contraire ? Dépendait-il du législateur antique, dépendrait-il du législateur moderne, de resserrer ou de relâcher, à volonté, le lien conjugal ? Qui empêche enfin l’union de l’homme et de la femme de rester, comme la domesticité et le louage, un contrat révocable, susceptible de toutes les restrictions et extensions possibles ?…

Les objections contre l’unité, l’inviolabilité et l’indissolubilité du mariage, traînent partout ; elles figurent parmi les motifs principaux des systèmes communistes, saint-simonien et phalanstérien : je n’ai que faire de les reproduire. L’amour de passage, affranchi de toutes les gênes que lui imposait naguère encore l’opinion, le