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lisation ; si, comparé au paganisme qui lui avait ouvert la route, il a avancé ou rétrogradé ; si on peut le prendre en toute confiance pour règle des relations amoureuses ; si, dans cette partie de la morale, il ne reste pas quelque progrès à réaliser, que le paganisme indiquait, mais que le christianisme n’a pas compris, qu’il nie au contraire, au risque de perdre, par la dissolution dont il est cause, la famille et la société ?

L’Église s’est toujours vantée de posséder sur l’amour et le mariage, comme sur l’éducation et tant d’autres choses, une morale hors ligne. La multitude l’a crue, sans y aller voir, quitte à rencontrer dans la pratique les plus effroyables mécomptes. Pour moi, surpris de voir, sous une loi soi-disant parfaite, l’impudicité en progrès, j’ai voulu passer à l’étamine la loi elle-même ; et j’affirme que le christianisme, lorsqu’il a entrepris de réformer les amours et de réglementer le mariage, n’a réussi qu’à dénaturer l’institution, désoler les cœurs et enflammer la luxure. Le christianisme ne sait rien du sacrement conjugal, rien du principe et de l’objet de la famille ; il n’a pas même retenu ce que lui en avaient légué ses auteurs. Ah ! chrétiens hypocrites, qui accusez les philosophes d’incontinence, croyez-vous que nous allions sans examen vous laisser intacte autour du front cette auréole usurpée ?

Telle sera donc la marche de cette controverse :

En ce qui concerne la famille et les relations des sexes, en quel état le christianisme a-t-il trouvé la civilisation ?

Quelle devait être sa mission, et sous ce rapport qu’a-t-il ajouté à l’héritage moral de l’humanité ?

Que laisse-t-il à faire à la Révolution ?

Si nous sommes fondés à élever aujourd’hui ces questions, et je défie qui que ce soit d’en disconvenir, je ne sais plus ce qui restera tout à l’heure, dans cette ma-