Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 3.djvu/107

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Maximin, né en Thrace, de sang goth, surnommé le Cyclope et le Phalaris de l’empire, est l’idéal du césar tel que le prétorien dut le rêver après Élagabal et Alexandre. Sa taille, dit la légende, de plus de huit pieds romains ; sa force, qui égalait celle d’un cheval ; son appétit, que trente livres de viande, vingt-cinq pintes de vin, n’effrayaient pas ; sa beauté, ses grands yeux, en faisaient un modèle d’empereur prétorien. De même qu’Antonin le Pieux avait marqué l’apogée du césarisme, Maximin est l’apogée du prétorianisme.

Les proscriptions recommencent : depuis si longtemps le soldat n’avait rien eu à dévorer de la caste patricienne ! Maximin est la colère soldatesque qui s’exhale après dix-sept ans de mollesse et de honte. Les consulaires, les lettrés, les gens de loi et d’administration, tout ce qui se distingue par la naissance, l’éducation, le génie, se voit en butte à la haine d’un prince que tourmente la conscience de sa grossièreté et de son origine barbare. Réaction inévitable contre un monde de philosophes, d’avocats, de prêtres, d’illuminés, qui n’avait cessé, comme une vermine, de ronger l’empire depuis le patronage de Julia Domna, continuée par Soémis et Mamée.

Maximin dédaigne de visiter Rome et l’Italie ; mais il sait battre l’ennemi, et il le refoule dans ses forêts.

Les supplices qu’il inflige sont ceux d’un sauvage : tantôt il fait assommer les condamnés à coups de massue, comme des chiens ; tantôt il les livre aux bêtes féroces, sous des peaux sanglantes d’animaux. Dans ce mépris affecté de l’humanité, ne reconnaît-on pas le dégoût de l’immonde société qui avait produit Élagabal, comme de la religiosité casanière d’Alexandre ? — « Maximin, lui dit Élagabal lorsqu’il se présenta pour reprendre du service, on prétend que tu as quelquefois fatigué seize, vingt et trente athlètes : es-tu de force à faire vingt passes avec une femme ? » Il avait un fils d’une beauté si singulière que Capitolin la compare à une image tombée du ciel, divinitùs lapsam ; et la pudeur de ce jeune homme n’était pas moins grande. Aussi impurs qu’Élagabal, les ennemis et compétiteurs de Maximin, les Balbin, les Maxime, les Gordien, s’en faisaient contre le jeune César un texte d’in-