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et dont toute la dignité fut dans la faconde. Voilà donc, me disais-je, avec quoi l’on mène les nations ! Ceux de 89, témoins de la tyrannie féodale et des corruptions du sacerdoce, n’eussent pas été dupes de ce clinquant ; il suffit, en 1804, qu’un soldat jacobin se dît empereur, pour changer les sentiments et les idées. Ceux qu’avait émancipés la raison philosophique furent séduits à leur tour par la fantasia littéraire. Quel génie, en effet, dans le christianisme ! Quelle poésie dans ce monde féodal ! Les belles choses que les carillons, la crécelle, la bûche de Noël, la fève des Rois, la cendre du Carême ! Ces misérables classiques, pendant trois siècles, n’y avaient pas pensé ; les romantiques en vivront quinze ans. Ô saintes demeures des moines, relevez-vous ! Les pères vous ont mises à l’encan dans leur folie ; les fils vous rétabliront dans leur repentir…

L’insulte hiérarchique poursuit l’homme jusqu’au cimetière.

Les enterrements, comme les mariages, sont de plusieurs classes. Dans un village de Picardie, le curé, afin de marquer l’échelle des rangs, s’est avisé de faire suivre aux convois funèbres deux chemins différents : l’un raide, étroit, et en ligne droite, pour les pauvres ; l’autre développé en une large et superbe courbe, pour les riches. Le maire, esprit libéral, de qui je tiens l’anecdote, veut s’opposer à cet abus de distinction ; il ordonne que la grande route sera suivie par tout le monde. Dénonciation du maire au préfet par le curé ; interpellations du préfet ; explications données par le chef municipal. Le prêtre gagne son procès ; et le maire, suspect de révolutionnarisme, est contraint de donner sa démission.

XXV

J’ai lu deux volumes publiés par Mgr Dupanloup,