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incompatibles de leur nature avec une faculté de libre arbitre.

S’il était passion ou affectivité pure, il ne serait toujours pas libre.

Si l’univers était anéanti, et que l’homme existât seul dans l’espace infini, ses facultés n’ayant plus sur quoi s’exercer, il ne pourrait pas se dire libre, si ce n’est peut-être dans ses souvenirs.

Mais l’homme est complexe : c’est un composé de matière, de vie, d’intelligence, de passion ; de plus il n’est pas seul. Je dis dès lors qu’il est libre de par la synthèse de sa nature ; qu’il ne peut pas ne pas être libre, c’est-à-dire doué d’une puissance qui dépasse, par sa qualité et sa portée, chacune et la totalité des spontanéités qui le composent ; voici pourquoi :

Qu’il existe véritablement des âmes, substances immatérielles, comme dit Descartes, ou des monades, forces élémentaires, selon l’idée de Leibnitz ; que la matière soit ou non divisible à l’infini ; par quel mystère s’unissent en l’homme deux natures aussi contraires que l’esprit et la matière, ou comment celle-ci peut engendrer la pensée, peu nous importe : ces questions touchent à l’absolu ; elles sont hors la science, et nous avons d’autant moins à nous en préoccuper que, le problème de la liberté étant donné par une conception de l’esprit, formée, comme toute conception, à l’occasion des phénomènes, c’est à la raison des phénomènes que nous devons demander la solution.

Sans aller donc au delà du phénomène, et considérant les choses telles que l’observation nous les montre, nous savons qu’aucune analyse ne saurait arriver aux dernières particules de matière, et que tout ce qui tombe sous nos sens, être organisé ou masse inorganique, nous apparaît comme une collection, une composition, un groupe.