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monde ne le sait pas ; voilà toute la différence. Le fatum christianum et le fatum mahumetanum sont identiques.

On entrevoit que, pour franchir le pas indiqué par Leibnitz, il fallait une énergie révolutionnaire dont son âme religieuse n’était pas douée, et dont le dix-huitième siècle lui-même, jusqu’en 89, fut totalement dépourvu. Même après 89, la philosophie, allemande et française, recula devant cet abîme.

XXIV

Après Leibnitz, le sauve-qui-peut est général. Ceux qui se piquent d’exactitude se réfugient dans l’absolu, qui pour le Dieu de Descartes, qui pour le Dieu de Spinoza ; le grand nombre ferme les yeux et s’accommode d’un éclectisme superficiel, à la façon de Voltaire et de Rousseau : Dieu et La Liberté ! Aujourd’hui encore, le monde est plein de gens qui trouvent cela sublime.

Hobbes, cité par Leibnitz : « Une chose est censée libre quand la puissance qu’elle a n’est point empêchée par une chose externe. » Ce qui rentre dans la spontanéité, arbitrale ou nécessaire, de Descartes et de Spinoza.

Le même, cité par M. Renouvier : « Quand plusieurs passions agissent simultanément et contradictoirement, il y a délibération : les bêtes, comme les hommes, délibèrent. Quand la délibération est finie, il y a volonté. S’il n’y a ni délibération ni excitation d’aucune sorte, l’homme n’agit pas. » — Par où l’on voit que Hobbes passe par toutes les théories, sans qu’il s’en doute : tantôt cartésien, tantôt leibnitzien, tantôt spinoziste.

Bossuet est pur cartésien : il admet la liberté d’indifférence et croit que l’homme agit en certains cas sans motifs, ce qui revient à dire que la liberté, n’ayant ni rime ni raison, est inutile, n’existe pas.

Malebranche suit Descartes ; il admet une faculté de