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viaire, et par laquelle, indépendamment de tout rapport subséquent, deux personnes de sexe différent sont unies, qui sans cela, et quoi qu’elles fissent, ne le seraient pas ? Pourquoi encore des publications, des témoins et autres formalités, si la collation du sacrement, par le ministre qui a le pouvoir de le donner, suffit ? Quand j’achète une maison par-devant notaire, je ne prends pas de témoins ; je ne fais pas trompetter mon acquisition dix jours à l’avance. Que signifie cette surcharge ?

Admettons les témoins, reste toujours à expliquer ce que peut être un mariage dont la cohabitation n’est pas l’élément essentiel. L’union légale de l’homme et de la femme serait-elle, comme le mariage de la religieuse avec le Christ, une épousaille spirituelle, dont la cohabitation physique est l’accessoire habituel, non obligé ? Alors autre chose est l’union des sexes, et autre chose le mariage. Qui empêche de marier les impubères, les eunuques, bien plus, les hommes entre eux et les femmes entre elles ?

Que si c’est la réunion de toutes ces circonstances qui constitue le mariage et donne à l’union de l’homme et de la femme sa moralité, on demande comment, dans un si grand nombre de cas, cette cérémonie solennelle est si peu efficace, si malheureuse ? D’où viennent tant de scandales, d’adultères, de divorces ? Tel, dans la liberté de ses amours, s’entoure de loyauté, de délicatesse et d’honneur ; tel autre dans son mariage est impur, gouverné par l’ambition et l’avarice. Qu’est-ce qu’un mariage qui vous a si mal mariés, tandis qu’à côté se rencontrent des amants que le concubinage unit si bien ? Évidemment, les gens qui se marient ne savent ce qu’ils font ; mais le législateur, le prêtre, le maire, le savent-ils mieux ? À quoi bon, dès lors, l’intervention du magistrat ? Quelle peut être l’utilité, au point de vue de la morale, de cette convention si universellement adoptée, le mariage ? La morale, la