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Dieu, son modèle, sicut in cœlo et in terrâ ; et que maintenant c’est la volonté de ce Dieu qui annonce devoir agir selon la mienne. Qui nous expliquera cette énigme ?

Restez dans la littéralité, et je vous défie d’en trouver la clef. Revenez au sens tropique, et vous vous inclinerez une fois de plus. L’âme qui prie s’exhorte au bien par la contemplation de sa beauté essentielle ; mais en même temps elle se reconnaît sujette à faillir, dans les luttes quotidiennes de la vie animale. Comment se relèvera-t-elle de ses chutes ? Par l’amour. Point de justification pour l’homme qui n’aime pas, c’est-à-dire qui ne pardonne point, car c’est tout un ; qui ne cherche pas tout à la fois la réalisation de la Justice en lui-même et dans ses frères. Un tel homme n’est pas un saint ; c’est un hypocrite, un apostat. Sauvez-vous par la charité ; cette parole de l’Évangile, mise en chanson, est le principe de la Justice nouvelle, qui arrive à la purification par le pardon, à l’encontre de la Justice des anciens temps, qui ne savait que haïr et se venger.

Et ne nous laisse pas choir dans la tentation, mais délivre-nous… — Ceci n’a plus besoin de commentaire. Que le sentiment de notre céleste beauté nous ravisse à la tyrannie des attractions inférieures : voilà le sens. C’est une reprise des premières phrases de l’Oraison, une ritournelle dans le goût des antiennes religieuses, et d’après les règles de la versification hébraïque. Les théologiens ont bâti là-dessus leur théorie de la grâce efficace, sans laquelle l’homme ne peut faire le bien ni se relever de ses chutes, mais qui ne manque jamais à celui qui la demande : littéralisme absurde, destructif de toute morale, comme de toute philosophie,

Du Malin. — Au dernier mot, l’allégorie se montre à découvert. Comme l’idéalité vertueuse a été personnifiée sous le nom de Père, l’idéalité contraire est person-