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fantastique qu’elle soit, est une, comme la grammaire, la logique, l’économie ; et elle est une, parce qu’elle est donnée dans l’absolu.

Cette situation de l’être humain, placé entre l’absolu que son entendement affirme, que son imagination réalise, que son cœur tend à adorer, et la vérité phénoménale, la seule qu’il lui soit donné d’atteindre, et dont sa dignité est solidaire, crée pour la philosophie un problème terrible, devant lequel la religion des peuples a toujours reculé, et dont la Révolution, plus hardie, fournit une solution hors de laquelle je ne découvre, quant à moi, de salut, ni pour la raison ni pour la morale.

La Révolution n’est point athée : elle ne nie pas l’absolu, elle l’élimine.

Qu’est-ce qu’un athée ?

Un homme qui nie l’existence de Dieu, répond le vulgaire, et qui en conséquence s’abstient de toute religion.

Mais si le respect de la Justice est l’essence même de la religion ; si le sens commun a érigé en proverbe cette maxime : Qui travaille prie ; si le Christ lui-même a mis au-dessus de toute pratique dévote l’adoration en esprit et en vérité, c’est-à-dire la morale pure ; si, dans le sein même du catholicisme, il a existé de tout temps, sous le nom de quiétisme, une tendance à cette simplification du culte, on ne voit pas que la négation de l’existence de Dieu soit pour la vie pratique d’aucune importance, ni pour la philosophie de grande valeur. C’est un pur malentendu.

Il faut que l’athéisme contienne autre chose, sans quoi l’on ne comprendrait pas la réprobation instinctive, universelle, dont il est l’objet.

L’athéisme est la négation de l’absolu, je veux dire de la légitimité du concept d’absolu, et, par suite, de toutes les idées sans exception.