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triser en lui, par sa raison, la pensée de l’absolu. La est la grande affaire, Hoc opus, hic labor est, dont la difficulté, comme on va voir, n’est pas petite.

VIII

Aux personnes qui se livrent exclusivement à l’étude des sciences naturelles et de leurs applications à l’industrie, il semble que rien ne soit plus aisé que de purger son entendement des conceptions transcendantales, et, comme on fait de la physique, de la chimie et de la médecine sans songer à l’absolu, de faire aussi du droit, de la politique, de l’économie, sans tomber dans la religion.

Aug. Comte, dont l’Europe admirait la raison si ferme et le vaste savoir, préparé de longue main par une étude approfondie des sciences naturelles, était tombé dans cette erreur ; et c’est merveille de voir avec quelle confiance le fondateur de la philosophie positive invite ses disciples à écarter de leur esprit tout théologisme, toute ontologie, et sans plus de façons à entrer dans la science. En lisant ce réformateur décisif, je ne puis m’empêcher de penser à certain personnage de Molière, débitant le fameux sonnet Sur la fièvre qui tient la princesse Uranie.

Votre prudence est endormie
De traiter magnifiquement
Et de loger superbement
Votre plus cruelle ennemie.

Faites-la sortir, quoiqu’on die,
De votre bel appartement,
Où cette ingrate insolemment
Attaque votre belle vie,
· · · · · · · · · · · · · · · · ·
Et sans marchander davantage
Noyez-la de vos propres mains.


M. Comte s’imaginait apparemment qu’il suffit de dire à la métaphysique : Partez ! et à la théologie : Allez vous-en !