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XXX

Anti-conceptualisme maçonnique. — Idée de Dieu.

Toute doctrine religieuse ou se disant telle se caractérise par le concept métaphysique qui lui sert de base.

La plus ancienne théologie reposait sur l’idée de substance ; elle aboutissait, comme la philosophie de Spinoza, au panthéisme. Or, notons ce point : Qu’est-ce que la substance ? Ce que l’entendement conçoit comme le soutien ou substratum des phénomènes, mais qui, échappant aux sens, impénétrable à la connaissance, reste pour la raison comme une simple hypothèse de la logique, une conception.

La théologie juive eut pour dominante la notion de cause, force, puissance, virtualité. Son Dieu, rouach elohim, souffle divin ou esprit des forces, autrement dit Jehovah, puissance, est un principe différent de la matière, qu’il crée, anime, façonne, par son action souveraine. Mais qu’est-ce que la cause, ou la force, en soi ? Encore une hypothèse de l’entendement, quelque chose d’ultra-phénoménal, une conception. Comme pendant du substantialisme de Spinoza, nous avons le dynamisme de Leibnitz.

La théologie chrétienne élève sur ces deux concepts, substance et cause, celui d’Intelligence ou Verbe. De là le gouvernement de la Providence et le règne des âmes, avec l’économie religieuse et sociale qui en découle. Mais qu’est-ce qu’une âme ? Quelle est cette entité, que Descartes définit, par une expression contradictoire, substance immatérielle ?… Une fiction de la pensée, c’est-à-dire toujours une conception.

Le conceptualisme, la négation de toute phénoménalité, tel est donc le caractère fondamental de toutes les