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cités, qui peuvent paraître intéressantes à un spiritualiste, à un chrétien, mais dans lesquelles le sens commun ne peut voir que l’abêtissement de la raison par la pensée religieuse. C’est le procédé de M. Jean Reynaud, dans les contrariétés qu’il reproche à la nature : le philosophe et le chrétien, partant du même principe, sont d’accord.

XIII

Est-il donc si difficile de pénétrer le sens de cette double allégorie ?

a) Le travail avant le péché.

L’homme, en vertu de son activité propre et de ses relations avec le monde, est ouvrier ; son travail est spontané et libre, soumis par conséquent à une loi de justice et de morale dont la pratique assure son bonheur, dont la violation au contraire le plonge dans la misère. C’est le point de vue subjectif, affirmé aujourd’hui par la Révolution, et que l’écrivain sacré présente comme une époque antérieure, époque d’innocence, de spontanéité, de liberté et de richesse.

b) Le travail après le péché.

Or, à cette loi du travail, qui ne peut avoir rien d’affligeant, puisqu’elle résulte de notre constitution, la nature ajoute la sanction de sa passivité. L’homme doit agir, travailler, d’abord parce qu’il est homme. Mais, afin que son action ne soit pas vaine, il ne subsistera que de ce qu’il aura produit, à l’aide de cet instrument inépuisable, qui est la Terre. C’est le point de vue objectif, le seul que découvre l’ancienne école économique. Ainsi s’unissent dans le Travail, selon la pensée supérieure du mythe, la liberté et la fatalité, la première devant, par le développement des facultés humaines, subalterniser de plus en plus la seconde.