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Relativement à la condition de l’ouvrier, elle implique :

Que le travail n’est pas d’ordre humain, c’est-à-dire moral et juridique, mais seulement de nécessité externe, imposé par l’inclémence de la nature et la rareté des subsistances ;

Qu’en conséquence, le travail n’a rien de spontané, et que toute la liberté dont il est susceptible consiste en ce qu’il ne doit être ni imposé ni empêché par aucune volonté ;

Que dans ces conditions le travail, même volontaire et libre, n’étant pas donné à priori dans la conscience, est répugnant de sa nature et pénible ;

Que par la force des choses, et par l’effet combiné des volontés humaines, à qui tout fatalisme est insupportable, le travail, d’autant plus repoussé qu’il est accompagné de plus de répugnance et de peine, tend à se séparer, comme force économique, du capital et de la propriété ;

Que de cette tendance irrésistible résulte la division du personnel économique en deux catégories : les capitalistes, entrepreneurs et propriétaires, et les travailleurs ou salariés ;

Que cela est fâcheux sans doute pour ces derniers, et digne de l’attention du souverain, qui dans certains cas peut y trouver le motif d’une taxe extraordinaire en faveur des déshérités de la fortune, ou d’un règlement de police sur les manufactures ; mais qu’il ne s’ensuit nullement que le travail puisse faire l’objet d’un droit positif, d’une garantie quelconque accordée aux travailleurs par l’État, ou ce qui revient au même par les capitalistes et propriétaires.

Ainsi raisonnent les économistes de l’école prétendue libérale, ennemis jurés de la féodalité, mais non moins hostiles à toute pensée de réorganisation dans une agita-