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J’écarte d’abord, comme étrangère au sujet, la question de l’immortalité de l’âme, que j’abandonne au mysticisme, la vraie science ne me permettant ni de la rejeter ni de l’admettre.

S’il est ou s’il n’est pas un Dieu, personnalité souveraine, âme de l’univers, de qui la nature est le produit et l’humanité la fille, la science, qui procède par observation, n’en peut rien dire. Elle n’affirme ni ne nie ; elle ne sait point, ne comprend même pas, et ne s’en inquiète nullement. Qu’importe à la Justice, qui doit exister par elle-même et se démontrer à la conscience sans adminicule étranger, cette hypothèse ?

Pareillement, s’il est ou non une survivance pour l’humanité, un recommencement de vie pour les âmes et les corps, la science n’en dit rien, et la morale s’en soucie aussi peu. Comme elle existe indépendamment de l’idée de Dieu et abstraction faite de son existence, elle existe aussi abstraction faite de l’immortalité ; elle n’a pas plus besoin de ce mythe que de l’autre.

L’euthanasie ou le bien mourir, faisant partie de la morale, doit se passer, comme le bien vivre, de toute considération de survivance ; c’est une fin de non-recevoir contre l’immortalité ou migration des âmes, qu’elle se présente comme consolation de la mort.

La Révolution, en réformant l’économie sociale et organisant l’égalité, assure à chaque homme la plénitude de ses jours : première condition de la mort heureuse. — En rétablissant la Justice dans l’État, elle assure la communion universelle : deuxième condition de l’euthanasie.

Mais qu’est-ce que la mort en elle-même ? qu’est-ce que mourir ? Telle est la question que la philosophie se pose, et dont la solution préalable est requise par la morale, à peine de laisser planer le doute sur ce que nous regardons, avec les sages de tous les temps, comme les signes