Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/111

Cette page a été validée par deux contributeurs.

comme firent Harmodius et Aristogiton, lorsqu’ils frappèrent le tyran Hipparque, aux fêtes des Panathénées… Non, cher Harmodius, tu n’es pas mort ; tu vis dans les îles bienheureuses, en compagnie d’Achille et de Diomède... Ici, c’est le citoyen qui se met en communion avec les anciens héros, toujours vivants au sein de la patrie, et que ni le fer de l’ennemi, ni la rage des tyrans, ne saurait atteindre.

Athènes avait fait de cette idée une institution ; c’était l’oraison funèbre des citoyens morts pour la patrie, dont les noms étaient gravés sur les marbres publics, et les enfants élevés aux frais du trésor. Croit-on que cela ne valût pas notre Requiem ?

Communion sociale, exprimée par la famille, organisée par la cité, par la confédération ou l’amphictyonie ; vie qui se prolongeait au delà du tombeau par la participation à la vie des ancêtres et à celle des descendants ; c’est ainsi que la mort disparaissait englobée dans la perpétuité de la patrie, et que le dernier soupir s’échappait dans le ravissement de la fraternité.

« Chez les Romains, dit M. Franz de Champagny, l’homme unissait sa vie à celle de ses aïeux et à celle de ses descendants. Au lieu de prolonger sa vie dans une douteuse éternité, il la prolongeait par le sentiment plus intime de l’hérédité. Pour lui, l’immortalité de la famille, de la tribu, de la patrie, remplaçait l’immortalité de l’âme… L’élysée du Romain, c’était la grandeur future de Rome. La vertu, le patriotisme et la gloire antique viennent de là : ce sont des vertus civiques transformées en vertus religieuses. » (Les Césars.)


Famille, tribu, patrie : quelle maigre immortalité pour nous autres chrétiens !… Il faut croire cependant que cette idée de communion sociale et de vie collective n’était pas sans quelque réalité pour les anciens, puisqu’elle leur fit produire tant d’actes d’héroïsme, qui, en