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Si mes idées ne sont pas neuves, elles sentent du moins leur terroir.

M. Granier de Cassagnac a écrit quelque part : Il faut supprimer le Socialisme… D’autres se flattent de l’avoir écrasé…

Pour moi, le dernier venu et le plus maltraité de ce grand mouvement qu’à tort ou à raison l’on a nommé Socialisme, et qui n’est que le développement de la Révolution, je ne demande la suppression ni l’écrasement de personne. Que la discussion soit libre, et que mes adversaires se défendent : c’est tout ce que je veux. Je fais la guerre à de vieilles idées, non à de vieux hommes.

Je pensais, en 1848, qu’après tant de catastrophes, toutes ces formules de l’antique antagonisme dont Aristote et Machiavel n’avaient pas été dupes, monarchie, aristocratie, démocratie, bourgeoisie, prolétariat, etc., ne devaient plus avoir qu’une valeur de transition ; que la constitution du pouvoir importait peu, pourvu qu’il passât vite, après avoir créé l’ordre économique ; que dans l’esprit de la nouvelle France la politique devait s’éclipser comme le culte et faire place à la Justice, et qu’accorder la même importance qu’autrefois à la raison théologique et à la raison d’État, c’était mentir à la Révolution et rétrograder.

Dans des jours d’agitation, j’ai soutenu cette thèse avec énergie, rendant critique pour critique, sarcasme pour sarcasme. Je n’ai pas fait pis que Voltaire, dont tant de gens, qui se taisaient alors, répètent aujourd’hui tout bas le cri de guerre.

Maintenant la période de démolition est finie. Le