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vote parisien : il est incapable de produire une idée. Pour rendre le suffrage universel intelligent, moral, révolutionnaire, il faut, après avoir organisé la balance des services et révoqué les priviléges, faire voter le citoyen par catégories de fonctions, conformément au principe de la force collective qui fait la base de la société et de l’État.

D. — La politique de la Révolution, à l’intérieur, est on ne peut plus claire ; elle consiste à procurer l’égalité, par l’organisation économique. Ici, plus de machiavélisme, plus de raison d’État : la liberté, la Justice, la publicité. Quelle sera la politique vis-à-vis de l’étranger ?

R. — Il n’y a pas à hésiter : la Révolution doit faire le monde à son image ou déchoir indéfiniment, entraînant dans sa ruine la civilisation tout entière. Les peuples sont fonctions les uns des autres, de même que dans l’État les groupes industriels et les individus. Tant que l’égalité ne sera pas faite par toute la terre, la Patrie sera en danger.

D. — La Révolution va-t-elle déclarer la guerre à l’Europe et au monde ?

R. — La Révolution n’agit point à la manière du vieux principe gouvernemental, aristocratique ou dynastique. Elle est le droit, la balance des forces, l’égalité. Elle ne fait acception de cités ni de races. Elle n’a pas de conquêtes à poursuivre, de nations à asservir, de frontières à défendre, de forteresses à bâtir, d’armée à nourrir, de lauriers à cueillir, de concert européen à maintenir. La puissance de ses institutions économiques, la gratuité de son crédit, l’éclat de sa pensée, lui suffisent pour convertir l’univers. Écartant d’abord toute question d’église et de prince, elle doit se borner à faire rayonner le droit autour d’elle, à affirmer partout la souveraineté de l’homme, du citoyen et de l’ouvrier ; pour premier acte, exiger le désarmement général, et, en cas de refus, dénoncer le casus belli.

D. — L’antique société ne cédera pas sans résistance : quels sont les alliés naturels de la France révolutionnée ?

R. — Toute alliance de peuple à peuple est déterminée par l’idée ou l’intérêt qui le domine. Est-ce le capital qui gou-