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damnation devrait être préférée au péché, si, par impossible, Dieu nous en imposait l’option. Or, ce qui n’est pour la théologie qu’une fiction de casuistique, est devenu, par la Révolution, une vérité de fait. L’Être transcendant, conçu et adoré comme auteur et soutien de la Justice, est la négation même de la Justice ; la religion et la morale, que le consentement des peuples a faites sœurs, sont hétérogènes et incompatibles. Il faut choisir entre la crainte de Dieu et la crainte du mal, entre le risque de la damnation et le risque de l’improbité : voilà ma thèse.

Un voile de mystère est répandu sur toutes les choses de la vie morale. Soulever ce voile, ce sera manifester le génie de la Révolution et hâter l’accomplissement des destinées.

Qu’est-ce que la Justice, ou comme d’autres disent, le droit et le devoir ? Est-ce une simple abstraction, une idée, un rapport, abstraitement conçu, à la manière des lois générales de la nature et de l’esprit ? Quelle est d’abord cette idée ? comment l’avons-nous conçue ? comment oblige-t-elle la conscience ?

Qu’est-ce que la conscience elle-même ? Un préjugé ? Mais un préjugé préjuge nécessairement quelque chose… Une faculté ? Où réside-t-elle ? en quoi consiste sa fonction ? quel en est le mode d’exercice ? où est son organisme ?

Qu’est-ce que l’égalité ? On tourne autour de ce mot, on le prononce du bout des lèvres : en réalité on n’en veut pas. Le pauvre s’en moque, le riche l’a en horreur, la démocratie le dément, personne n’y croit. — L’égalité est-elle de par la nature ou contre