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Hors de l’autorité point de salut : qu’on ne leur en dise pas davantage ; ils sont édifiés, ils n’entendent plus rien. Et il ne manque pas de sots qui admirent : la prédestination, qui ne serait rien sans la Providence, je veux dire sans l’autorité, ne lui sert-elle pas de claque ?

Autorité, Providence, Prédestination, quelles idées pompeuses ! Combien ce style plein de poésie et de mystère l’emporte sur le jargon technique, utilitaire, de la mécanique constitutionnelle ! Vous êtes transporté dans les siècles antiques ; vous revoyez le chêne de saint Louis, les clefs de Pierre, la verge d’Aaron, la houlette de Jacob. C’est à pleurer d’attendrissement. Tel gentillâtre de la littérature n’en demande pas davantage pour se convertir au régime absolu. Ah ! l’Église n’emprunte pas ses idées et ses symboles à la routine des industriels et des marchands ; ce sont des rayons qu’elle dérobe, comme Prométhée, au foyer de l’Absolu. Semblable à Jéhovah, elle s’entoure de ténèbres et de mystères ; elle procède par révélations, fulgurations, coups du ciel. Elle est la Providence, souveraine, indiscutable, dont la rosée tombe sur les élus pendant que ses grêlons et ses foudres vont chercher les méchants, et qui cache sa main. Vous êtes exalté sans qu’on voie qui vous porte, ou frappé d’un trait invisible : c’est le doigt de Dieu qui vous touche, Digitus Dei est hic.

Assez comme cela, messeigneurs. Vos lévites ont tort de se plaindre, puisqu’ils sont chrétiens et que leur désir est de faire revivre la foi antique. Mais nous, hommes de la Révolution, qui savons discerner le passé de l’avenir, nous avons le droit de le dire, votre Providence, votre autorité, n’a pas le sens moral.

On lit dans l’histoire ecclésiastique que, les chrétiens d’Alexandrie ayant, dans une émeute, démoli le temple de Sérapis, on trouva dans les caves les machines avec