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sence de cet Esprit dans le sacerdoce, s’il faut encore des règles de gouvernement pour l’Église, comme il faut des règles de conduite pour les fidèles ? Cessez de me parler de droits politiques, de formes parlementaires, et de toute votre procédure constitutionnelle. Tout cela est de l’athéisme. Je suis chrétien : j’ai ma foi, j’ai mon Christ, qui, sauf les accidents inévitables à l’imperfection de notre nature, me garantit, autant que je puis le désirer, la sagesse et la féauté de mes pasteurs. Valent-ils donc moins que vos ministres, vos préfets, vos députés, pour n’être pas arc-boutés dans tous leurs actes par les articles d’une constitution ?…

Certes, un tel discours est irréprochable de logique, et d’une hauteur qui étonne la Justice même. Peut-être, aux temps de la ferveur apostolique, je n’eusse trop su qu’y répondre : aujourd’hui l’expérience en a démontré l’illusion.

Ce que le christianisme a dit de la liberté, de l’égalité, de la félicité, qu’elles ne sont pas de ce monde, on peut, en lui rétorquant l’argument, le dire avec infiniment plus de raison de l’autorité. Elle n’est pas faite pour des mortels ; et m’est avis que l’Église, en nous prescrivant l’obéissance, a pris justement le contre-pied de la vérité et de la morale. Du premier au dix-neuvième siècle, l’autorité, même assistée de l’Esprit saint, n’est parvenue à se rendre respectable qu’en se cuirassant de Justice, ce qui veut dire en s’entourant des parachutes de la Révolution. Ôtez les formes légales, ce que je nommerai les mœurs du pouvoir, elle n’est plus que tyrannie et sacrilége.

Et c’est pour cela que je ne puis souffrir l’hypocrisie de ceux qui, n’ayant au cœur ni foi ni justice, se font de l’autorité un masque sous lequel s’abrite leur scélératesse. Il faut relever le principe d’autorité : c’est leur réponse à tout, comme le bêlement d’Agnelet dans l’Avocat Patelin.