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sieurs reprises de faire servir à d’autres opérations les sommes versées pour le cautionnement. Cabet exposait alors que ce qu’il en avait fait avait été pour le bien de la communauté, et le bill d’indemnité ne lui manqua jamais. Ne l’a-t-on pas vu, en 1849, assigné en police correctionnelle par un malheureux Icarien qui avait dépensé tout son avoir à faire le voyage de Nauvoo et n’avait rencontré que la plus affreuse misère, se prévaloir de l’art. 1837 du Code civil sur la société universelle de biens et de gains, prouver que le plaignant, qui par bonheur pour lui s’était réservé quelques centaines de francs, avait violé ses engagements de communiste, et gagner son procès ? C’est précisément la thèse de Mgr Bonamie contre Mme de Guerry, avec cette différence toutefois, que, la constitution de Picpus ayant été changée, Mme de Guerry rentre dans ses droits.

Cabet était honnête homme, raide comme un légiste dans ses convictions. Lui aussi, avec la fraternité, la charité, la communauté et l’amour, refaisait, sans le savoir, le catholicisme. Son premier soin, à Nauvoo, fut de se faire décerner la dictature : dans un pays de liberté, où la terre est pour rien, le travail plus demandé qu’offert, c’était provoquer contre lui la révolte de tous les instincts. Son erreur lui coûta la vie. Cabet est mort de chagrin après avoir été destitué par son église : ses amis d’Europe ont recueilli sa mémoire.

XXIV

Dans le pays de la foi, nous allons de miracle en miracle. Croirait-on que ce régime d’absolutisme présuppose, comme état naturel de l’homme avant le péché, l’absence de tout gouvernement, l’anarchie ? Rien n’est pourtant plus vrai.

J’ai eu l’occasion de rapporter dans ma précédente