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sœur, d’une dévote : une lettre anonyme le dénonce à Sa Grandeur, qui le sacrifie sans l’entendre.

« Nous possédons une caisse de retraite, formée de nos deniers. C’est l’évêque qui en dispose, toujours en vertu du principe d’autorité souveraine ; et dans aucun cas, quels que soient l’âge et l’infirmité, nous n’avons droit à une pension. L’évêque seul, par le ministère d’une commission qu’il nomme et dirige, juge de l’opportunité, accueille ou repousse les réclamations.

« Sous ce régime de l’autorité garantie par l’obéissance, en l’absence de règlements et de droit positif, la faveur dispose des places, de l’avancement et des récompenses. Le prêtre modeste, que recommande son seul mérite et que n’appuie pas un protecteur bien en cour, laïque ou ecclésiastique, mâle ou femelle, est sûr de végéter toute sa vie dans l’obscurité. Pourquoi, disait-on à l’archevêque de ***, ne tirez-vous pas de son trou le curé C, si laborieux, si savant, si exemplaire ? — Parce qu’il ne demande rien, répondit-il.

« Pas de concours ; point d’avantage, ni pour le mérite, ni pour l’ancienneté. Les luttes théologiques et scientifiques sont remplacées par les courses à la cure, les steeple chase, c’est le cas de le dire. Le meilleur coureur est sûr de la victoire. Dans un diocèse voisin de la capitale, le desservant d’une cure lucrative vient à mourir : aussitôt sollicitations de pleuvoir à l’évêché. Pour relever le prix de sa faveur, l’évêque dit à l’élu : Je vous donne la préférence sur 53 de vos confrères !

« Ma foi, disait un curé, j’ai fait comme tout le monde : ma cure m’a coûté 500 fr. M. l’archiprêtre de ***, très-puissant à l’évêché, quêtait pour la reconstruction de son église. Il s’adressa à moi d’une manière significative. Je compris, et pour 25 louis j’eus ma nomination. »

XXII

Je me méfie de ces anecdotes, d’autant plus que je suis loin de donner aux prestations de tout genre qui se font dans l’Église pour l’entretien du culte le sens simoniaque que la conscience séculière n’est que trop disposée à leur attribuer.

En principe, ne l’oublions pas, l’Église subsiste de dons