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positif et de plus idéal : en eux, nous possédons l’antiquité tout entière, théorie, pratique et histoire.

L’histoire romaine, depuis l’expulsion des Tarquins jusqu’à César, est la démonstration éclatante de cette vérité, que le pouvoir élevé au-dessus de la Justice par la raison d’État ne peut supporter de constitution, que si on lui en impose une il l’use à la longue, et que son dernier mot est la force. Sans tant philosopher, et longtemps avant d’avoir reçu la visite de Cynéas, les pères conscrits l’avaient compris et traitaient en conséquence la plèbe, qui de son côté le leur rendait en émeutes perpétuelles.

Cette constitution romaine, qui fit l’admiration de Polybe, ne se soutint qu’à force de révolutions et de remaniements, exempte de troubles alors seulement que le peuple était occupé à la guerre. Après quatre cent soixante ans d’agitations pour la liberté civile et l’égalité politique, Rome ne trouve la paix que dans la dictature perpétuelle : de ce moment date sa décadence, terme fatal d’une évolution dont le point de départ avait été la justice patricienne, l’inégalité.

La féodalité appartient au système de la Providence, dont je parlerai plus bas.

XI

Sur la fin du moyen âge, la Renaissance, et tôt après la Réforme, semblent devoir apporter aux nations fatiguées quelque rafraîchissement. Mais la théorie de la nécessité ressuscite, comme si, pour apprendre la Justice, la raison des peuples avait eu besoin, en désapprenant l’Évangile, de rapprendre le Destin.

Machiavel, Hobbes, Spinoza, fondent l’État sur le principe de nécessité, et aboutissent tous trois au despotisme. Ce que je trouve odieux dans ces philosophes, c’est que là où Mahomet, dans le sentiment de son impuissance,