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de la finance, etc. Pour comble, il avait recueilli, analysé, comparé jusqu’à cent cinquante constitutions d’états, dont la substance se trouve résumée dans son livre.

Rien n’y servit : ni l’érudition du publiciste, ni les observations de l’économiste, ne sauvèrent l’utopie aristotélique de l’écueil où avait échoué celle de Platon. Les temps n’étaient pas venus sans doute : la science était trop faible, le préjugé trop fort, la raison trop confuse, la conscience trop engourdie. De même que Platon, Aristote donne la préférence à l’aristocratie ou gouvernement des meilleurs, et distingue du premier coup dans la société trois classes d’hommes : une classe supérieure, gouvernante ; une classe inférieure, ou plèbe, obéissante ; et une classe servile, travaillant pour les deux autres. De là, bon gré mal gré, toutes les iniquités du pouvoir aristocratique, mais iniquités nécessaires, qui font partie intégrante des attributions et prérogatives du sénat, et sans lesquelles la noblesse, le gouvernement, par suite la société elle-même, périraient.

Fallait-il naître homme de génie, s’appeler Aristote, pour nous donner ce travestissement de la mythologie du Fatum ? Comme le gouvernement aristocratique naît de la nécessité, il a pour loi la nécessité ! C’est plus métaphysique que la fable, mais c’est moins beau à coup sûr. Mais dites-moi donc, ô philosophe, quelle différence vous faites alors de l’aristocratie et du despotisme ? Qu’importe, pour parler au nom de la nécessité ou de la raison d’État, que le despote soit un ou plusieurs ? Le gouvernement en sera-t-il plus équitable, plus moral, plus rationnel, moins enclin à l’inorganisme par la concentration fatale de ses pouvoirs ? Et puis, d’où savez-vous que dans tout cela il y ait nécessité ?…

Qui a nommé Platon et Aristote a dit la pensée de la Grèce et de l’Orient dans ce qu’elle eut à la fois de plus