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C’est par cette loi d’équilibre, commune à la société et à l’univers, que l’économie est susceptible d’une application de la Justice ; que la loi subjective et la loi objective peuvent se mettre d’accord, et que la Justice immanente, la Justice affranchie de tout respect transcendantal, trouve une première sanction, que j’appellerai sanction externe

Tu as tout disposé, dit la Sagesse, avec nombre, avec poids, avec mesure ; Omnia in pondere, et numero, et mensurâ, disposuisti. Comment l’Église n’a-t-elle pas vu que dans cette vérité, si bien démontrée par la science profane, il y avait un axiome pour sa théologie, une loi pour sa Justice, un commandement pour sa discipline ? L’économie chrétienne, comme l’économie païenne, a été livrée au hasard ; elle est devenue une économie d’iniquité. Et telle est aujourd’hui la profondeur du mal, l’immensité de la faute, que revenir à la Justice c’est renoncer au christianisme.

Combien plus prudente, plus généreuse, plus véritablement inspirée a été notre Révolution, lorsqu’elle a dit par la bouche de Condorcet :

« Il est aisé de prouver que les fortunes tendent naturellement à l’égalité, et que leur excessive disproportion ou ne peut exister, ou doit promptement cesser, si les lois civiles n’établissent pas des moyens factices de les perpétuer et de les réunir ; si la liberté du commerce et de l’industrie fait disparaître l’avantage que toute loi prohibitive, tout droit fiscal, donnent à la richesse acquise ; si des impôts sur les conventions, les restrictions mises à leur liberté, leur assujettissement à des formalités gênantes, enfin l’incertitude et les dépenses nécessaires pour en obtenir l’exécution, n’arrêtent pas l’activité du pauvre et n’engloutissent pas ses faibles capitaux ; si l’administration publique n’ouvre point à quelques hommes des sources abondantes d’opulence fermées au reste des citoyens, etc. »

De telles paroles, hélas ! étaient dignes du martyre : l’exécuteur des vengeances réactionnaires, Robespierre,