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qui, à propos de la division du travail, faisait remarquer qu’autre chose est l’économie politique et autre chose la morale ; que, si l’application du principe de division entraîne à des conséquences incompatibles avec la dignité humaine, cela n’infirme pas la valeur du principe, mais soulève un problème à résoudre ultérieurement par la science sociale.

Que ne faisait-il de même pour la population ! En l’état actuel des choses, aurait-il dit simplement, il y a défaut de balance entre le mouvement de la population et celui des subsistances. Cette disproportion accuse tout à la fois une lacune dans la science et un désordre dans la pratique sociale. Elle soulève un problème que l’économie politique, d’accord avec la physiologie, la psychologie et la morale, doit résoudre, mais que Malthus a tranché sans l’entendre.

Bastiat lui-même, le chaste Bastiat, apporte à la thèse la pompe de son style. Les autres avaient parlé au nom de l’humanité, au nom de la morale, au nom des intérêts sacrés de la femme et de l’ouvrier ; lui, il parlera au nom de la pudeur.

L’onanisme pratiqué à la mode de Malthus, dans le but indiqué par Malthus, suivant Bastiat est une loi de la pudeur même. Il en trouve la preuve dans la réserve dont s’entoure l’amour honnête, dans la sévérité de l’opinion, qui flétrit la fornication, le concubinage, l’inceste, et jusque dans l’institution sacrée du mariage. Toutes ces choses, à son avis, n’ont de sens et de valeur que parce qu’elles sont une révélation spontanée du moral restreint :

« Qu’est-ce que cette sainte ignorance du premier âge, la seule ignorance sans doute qu’il soit criminel de dissiper, que chacun respecte, et sur laquelle la mère craintive veille comme sur un trésor ?

« Qu’est-ce que la pudeur qui succède à l’ignorance, arme