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idées, surtout par la domination impériale. Loin que l’Église ait vaincu le paganisme, elle en a pris, à fur et mesure, comme elle a fait pour le judaïsme, tout ce qu’elle a pu ; elle en a adopté les codes, la hiérarchie, les institutions, les rites. C’est pour lui plaire, et afin d’entraîner les masses dépossédées de leurs dieux, autant que pour obéir à la logique de son propre mouvement, qu’elle posa, au quatrième siècle, la divinité de son Christ, et que plus tard elle consacra le culte des images.

Avec les gnostiques, héritiers des anciennes doctrines de l’Égypte, de la Syrie, de la Perse, de l’Inde et de la Grèce, l’Église n’en finit qu’en donnant elle-même une gnose, bien moins savante que celle de Valentin, bien moins sévère que celle de Marcion, de Cerdon, de Tertullien ; bien moins poétique que celle des deux Bardesane, mais telle qu’il la fallait à une multitude grossière, qui voulait aussi avoir ses parfaits, passer pour spirituelle ou pneumatique, et ne supportait pas le reproche de psychisme que lui adressaient les gnostiques.

Or, comme la vitalité d’une Église est en raison directe de l’intensité et de l’homogénéité de sa foi, laquelle à son tour est en raison inverse de l’activité intellectuelle qu’elle soulève ; les sectes gnostiques, trop livrées à la dialectique, trop métaphysiciennes, trop idéalistes, trop libérales dans leur gouvernement, quelques-unes trop suspectes dans leur moralité, s’éteignirent peu à peu, et leurs débris, gardant leurs spéculations in petto, se réunirent au groupe orthodoxe. La force y aida : furent-elles vaincues ? non,