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« Puisque vous repoussez la parole, disent Paul et Barnabé aux chefs de la Synagogue, nous nous tournons vers les Gentils, convertimur ad gentes. »

Une église qui crucifie, comme faux christ et faux prophète, le fondateur de l’église rivale ; qui chasse, lapide, précipite les apôtres de celle-ci ; qui, plutôt que d’accepter l’interprétation messianique des Nazaréens, se fait exterminer en masse et meurt héroïquement pour sa foi, cette église a-t-elle été vaincue ? Titus, après lui Adrien, détruisirent la nationalité judaïque. Nombre de transfuges, désespérant de Jéhovah et de Moïse, allèrent grossir les rangs chrétiens ; d’autres se rallièrent qui aux Égyptiens, qui aux mages : la Synagogue protesta toujours, elle proteste encore.

Ce que je viens de dire du judaïsme s’applique à toutes les puissances que l’Église a eu à combattre : paganisme, magisme, égyptianisme, druidisme, pythagorisme, platonisme, gnosticisme, arianisme, pélagianisme, manichéisme, mahométisme, schisme grec, Réforme, Renaissance, philosophie ancienne et moderne, tiers-état, empire, royauté, parlement, science, art, liberté, finalement la Révolution.

L’Église n’a pas plus vaincu le paganisme qu’elle n’avait vaincu le judaïsme. D’après un calcul statistique cité par Matter, les chrétiens, lors de l’avénement de Constantin, formaient environ le vingtième de la population de l’empire. Sur tous les points, leurs confréries se composaient de ce que la dissolution générale faisait perdre chaque jour aux religions locales, frappées dans leur principe par le progrès des