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Il existe, en dehors de la série fiscale, une matière imposable, la plus imposable de toutes, et qui ne l’a jamais été ; dont la taxation, poussée jusqu’à l’absorption intégrale de la matière, ne saurait jamais préjudicier en rien ni au travail, ni à l’agriculture, ni à l’industrie, ni au commerce, ni au crédit, ni au capital, ni à la consommation, ni à la richesse ; qui, sans grever le peuple, n’empêcherait personne de vivre selon ses facultés, dans l’aisance, voire le luxe, et de jouir intégralement du produit de son talent et de sa science ; un impôt qui de plus serait l’expression de l’égalité même.

— Indiquez cette matière : vous aurez bien mérité de l’humanité.

— La rente foncière.

Allons, faux philanthrope, laissez-là votre impôt somptuaire, votre impôt progressif, et toutes vos adulations à la multitude envieuse ; imposez la rente de tout ce dont vous voudriez dégrever les autres impôts : personne n’en ressentira de gêne. L’agriculture demeurera prospère ; le commerce n’éprouvera jamais d’entraves : l’industrie sera au comble de la richesse et de la gloire. Plus de privilégiés, plus de pauvres : tous les hommes égaux devant le fisc comme devant la loi économique…

Démontrer cette proposition, c’est faire tout à la fois la théorie de la rente et de l’impôt, et, après en avoir expliqué la nature, en opérer la balance.

Les économistes ne sont point d’accord sur la nature de la rente : je vais, en disant moi-même ce qu’elle est, montrer la cause de ce dissentiment.

Point de richesse sans travail, ne fût-ce que celui de la simple appréhension : tout le monde est d’accord de ce premier principe.

Point de travail sans dépense de forces, laquelle dépense peut se ramener à quatre catégories : nourriture,