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ment, doit être approuvée par le conseil d’État. C’est une garantie que le législateur de 89, en laissant subsister le culte, avait prise contre les empiétements du clergé. Or, si, répondez-vous, le pouvoir autorise, qu’avons-nous à nous plaindre ? N’est-il pas le représentant de la conscience publique et le gardien de la propriété ?

Allons plus loin : je ne voudrais pour rien au monde dissimuler rien de ce qui peut vous servir d’excuse.

De qui l’Église reçoit-elle les biens qui chaque jour lui arrivent ? Du pays lui-même, de la classe qui possède, de la bourgeoisie. La bourgeoisie, en ce moment, refait à sa manière l’œuvre de Charlemagne. Devenue dévote, par peur du socialisme, elle se met, qui pour un peu, qui pour beaucoup, à doter le clergé. Les richesses que la bourgeoisie accumule, Dieu sait comme, elle en fait part à l’Église : Ce qui vient de la flûte, dit le proverbe, va au tambour. Le gouvernement, sauveur des bourgeois, ne fait, par ses autorisations, que donner l’exequatur à leurs volontés.

Puis, il est juste de rappeler encore, à propos de ces détournements d’héritages que l’on reproche à l’Église, la complicité des sectes modernes, saint-simoniens, phalanstériens, communistes, et de la majorité des démocrates. Quand de prétendus novateurs attaquent avec un tel acharnement l’hérédité, quelle merveille que l’Église, autant qu’il est en elle, corrige ces hasards de la naissance, ces caprices de la fortune, ces abus de la propriété ? On demandait pour l’État, pour la communauté, quart, tiers, moitié, des successions : l’Église se charge de la besogne. Est-ce au père Enfantin ou à ses acolytes de se plaindre ?

Si donc nous disputions devant le juge, certainement j’aurais tort. Mais il ne s’agit point ici de la politique du gouvernement, qui peut s’égarer aussi bien que la con-