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l’homme anéanti, la Justice succombe, et la société avec elle.

Vient alors la Révolution, qui ouvre pour l’humanité un âge nouveau. Par elle la Justice, vaguement connue dans la période antérieure, suivie d’instinct, paraît dans la pureté et la plénitude de son idée.

La Justice est absolue, immuable, non susceptible de plus ou de moins. Elle est le mètre inviolable de tous les actes humains.

Supposez une société où la Justice soit primée, de si peu que ce soit, par un autre principe, la religion par exemple ; ou bien dans laquelle tels individus jouissent d’une considération, de si peu qu’on voudra, supérieure à celle des autres : je dis que, la Justice étant virtuellement annulée, il est inévitable que tôt ou tard la société périsse. Si faible que soit la prééminence de la foi et de la féodalité, le jour arrivera où le supérieur exigera le sacrifice de l’inférieur, où par conséquent l’inférieur se révoltera : telle est l’histoire de l’humanité, telle est la Révolution.

Cette évolution de l’idée juridique, dans l’esprit qui la conçoit et dans l’histoire qui la représente, est fatale. S’il existe des créatures raisonnables dans Jupiter, Vénus ou Mars, ces créatures, en vertu de l’identité de leur raison, ont la même notion du Droit que celle qui régit notre humanité.

Et si ces mêmes créatures, avant d’arriver à la pleine et pure notion du Droit, ont dû, comme nous, par la loi de leur organisme et la constitution de leur intelligence, traverser une période préparatoire, pendant laquelle la Justice aura été observée comme un ordre souverain, leur religion, subalternisant la Justice, prononçant en conséquence l’indignité du sujet juridique, doit avoir subi les mêmes phases que la nôtre, et sa dernière formule aura