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l’hypothèse transcendantale elle-même : pour la gloire du Grand Être il ravalerait l’individu, il tuerait en lui le sens moral et anéantirait la Justice.

Puis, c’est un fait non moins bien attesté par l’histoire que celui que nous venons de relater à propos de la religion, que le mouvement de la Justice parmi les nations est parallèle à celui de la liberté et inverse du communisme, du gouvernementalisme et de toutes les formules qui tendent à absorber l’initiative personnelle dans la société ou l’État.

Enfin, il est manifeste que la Justice ne peut être rapportée à la sympathie ou sociabilité, sentiment de pur instinct, qu’il est utile et louable de cultiver, mais qui par lui-même loin d’engendrer le respect de la dignité dans l’ennemi, que commande la Justice, l’exclurait énergiquement.

Parmi les espèces animales qui peuplent le globe, il en est plusieurs qui se distinguent par leur sociabilité. L’homme fait-il partie de ces espèces ? Oui et non. On peut le définir tout aussi bien un animal de combat qu’un animal sociable. Ce qui est sûr, au moins, c’est qu’il répugne à l’association telle que la sentent et la pratiquent les bêtes, et qui est le pur communisme. L’homme, être libre par excellence, n’accepte la société qu’à la condition de s’y retrouver libre : condition qui ne peut être obtenue qu’à l’aide d’un sentiment particulier, différent de la sociabilité et supérieur à elle : ce sentiment est la Justice.

Quant à l’assistance, dont le devoir, antérieur à tout droit, constituerait selon M. Oudot la Justice, c’est une vertu de conseil, non de précepte, comme parlent les casuistes ; fort bonne en elle-même, comme la charité dont elle relève, mais tellement étrangère à la Justice, que l’objet de celle-ci est de l’annuler, en la rendant inutile.

La Justice, ne nous lassons pas de le rappeler, est le