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pas, ne leur commande rien ; il examine leurs actes, et en requiert l’annulation ou la sanction près du pouvoir arbitral…

Tels sont, d’après la nouvelle théorie, les rapports du pouvoir consulaire, ou ministère public, avec les ministres.

567. La liste civile est fixée pour toute la durée du règne.

Les appointements du roi portent le nom particulier de liste civile. Autrefois, le roi était propriétaire, rentier, péager, affermeur de gabelles, octroyeur de permis de travail : l’aubaine, la régale, etc., étaient la source de ses revenus. La Constituante, en supprimant ou en convertissant en contribution régulière les revenus royaux, et les remplaçant par une liste civile, a par là-même transformé le roi en fonctionnaire salarié : c’était changer son caractère.

Seul de tous les organes de l’État, le roi représente, dans sa splendeur et dans sa force, la société : de là l’étendue de la liste civile destinée aux frais de la magnificence consulaire, et dont il serait difficile d’enlever au chef du pouvoir central la libre disposition. Au reste, la liste civile, calculée pour des dépenses prévues et imprévues, est toute consommable ; d’ailleurs, par l’organisation du travail, l’égalité des salaires et la centralisation des propriétés, on n’a point à craindre que cette unique inégalité sociale, si toutefois c’en est une, devienne moyen de despotisme, ou principe de corruption[1].

568. On voit avec quelle facilité les prérogatives de la monarchie, autrefois si mystérieuses, environnées d’une sorte de terreur divine, maintenant transformées par une force invincible, se prêtent à des interprétations rationnelles. Il n’est pas jusqu’à l’inviolabilité royale qui ne trouve aussi son explication.

La personne du roi est inviolable et sacrée. Ces paroles de la Charte couvrent une vérité qui semble n’avoir jamais été comprise. Tout fonctionnaire public est inviolable dans l’exercice de ses fonctions. La raison de cette inviolabilité est que le fonctionnaire en exercice représente le souverain. Or, ce qui distingue le chef du pouvoir central de tous les fonctionnaires publics, c’est qu’il est, lui, toujours dans l’exercice de ses fonctions : l’impulsion et la surveillance dans le chef de l’État, de même que la vie dans l’homme, n’admettant pas d’interruption.

Tout citoyen doit au roi, symbole de la puissance consulaire, le

  1. L’auteur a cru devoir laisser subsister ce paragraphe, la liste civile conservant, sous le gouvernement républicain, son analogue dans le traitement du président, des ministres et hauts fonctionnaires, et dans l’indemnité des représentants. (Note de l’éditeur.)