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la première (383), est à peu près achevée, et n’a plus besoin que d’être çà et là rectifiée et mise en ordre[1]. Nous avons présenté nos vues à cet égard. Pour la pratique, c’est sans contredit le point sur lequel il est le plus aisé d’opérer, sans soulever d’orages ; c’est de ce côté qu’on trouvera les plus douces et les plus heureuses transitions. C’est au pouvoir à choisir entre 25 ou 50 millions de travailleurs, qui lui demandent des capitaux à bon marché, et lui prêteront en échange leur appui, et quelques centaines de monopoleurs privilégiés qui le font trembler de leurs votes.

3. Mouvement législatif : — conversion de la propriété individuelle en gérance responsable, centralisation des capitaux, de l’industrie, de l’agriculture et du commerce, par l’assurance, les sociétés spontanément formées, l’hypothèque, l’impôt, le cadastre, l’extension des divisions administratives, les attributions nouvelles des tribunaux, la réunion au domaine public des charges vénales, et progressivement des professions libres.

J’ai préludé à ce travail dans mes mémoires sur le droit de propriété. Les colères que la négation de ce droit soulève, et la tendance du gouvernement, — que je sépare ici, à dessein, de l’ensemble de nos institutions, parce que ce sont les préjugés que j’accuse et non les choses, — m’ont prouvé que, sous ce point de vue de la science, aucune réforme ne pouvait être essayée, et que nous devions nous contenter de modifier graduellement notre système législatif en formulant la jurisprudence sur les rapports qu’engendrent chaque jour le commerce et l’industrie, à fur et à mesure de l’accomplissement des faits. La propriété est impraticable, subversive, injurieuse : l’impossibilité de résoudre, dans ce système, les questions du remboursement de la dette publique, des sucres, des douanes, des tarifs, des travaux publics, etc., etc., le démontre. Or, ce que le gouvernement, dans l’étroitesse de ses vues, respecte avant tout, c’est la propriété. D’un élément simple il fait la base même de la société : de là vient qu’au lieu de résoudre les questions, il les tranche ; qu’au lieu de décider, il transige ; qu’au lieu d’intervenir peu à peu dans la haute industrie, il l’abandonne aux débauches de l’intérêt privé, et se dessaisit encore des exploitations jusqu’à ce moment réservées à l’État ; de là, enfin, l’appui que trouvent dans le pouvoir les monopoles, les coalitions de capitalistes, les exigences des compagnies, propriétaires ou usufruitières de canaux, chemins de fer, etc.

  1. Là est la plus grande erreur de tout l’ouvrage. L’auteur a prouvé lui-même, depuis la première édition de ce livre, qu’il y avait tout à faire encore dans la question du crédit, de la circulation, de la valeur, et des monnaies. (Note de l’éditeur.)