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de justice, gens de livrée, avocats, médecins, prêtres, artistes, et une foule d’autres professions moins honorables. Parmi ces professions, il en est, comme nous le ferons voir au paragraphe suivant, d’essentiellement anormales, par conséquent de sujettes à réforme, mais que l’on ne saurait pour cela déclarer aujourd’hui improductives, puisque la condition présente de la société en a fait un besoin ; d’autres sont productives au plus haut degré, leur spécialité étant de produire, non ce que l’homme doit consommer pour vivre, mais ce pour quoi l’homme a reçu la vie, c’est-à-dire le beau et le vrai, l’art et la science.

D’un autre côté, l’utilité du produit étant la condition nécessaire de l’échange, comme l’échange est la condition nécessaire de la vie du travailleur, la société ne peut subsister sans des communications actives et loyales entre les différentes espèces d’industries, en un mot sans une centralisation commerciale.

Or, afin que l’on ne nous accuse pas de procéder par induction et de donner des postulés comme des corollaires, reportons-nous aux principes. 1o Le travail est l’action intelligente de l’homme sur la matière, dans un but de satisfaction personnelle ; 2o la première loi du travail est la division ; 3o par cette loi, tous les travailleurs sont solidaires. Lors donc que, soit par exubérance de travail, soit par défaut de communications et d’échanges, soit par l’effet des concurrences ou par toute autre cause indépendante de la volonté des producteurs, il y a sur certains points encombrement de produits, et par suite dépréciation et non-valeur, n’est-ce pas parce que le travail a été mal divisé ? n’est-ce pas parce qu’une des fonctions sociales, le commerce, a été remplie sans intelligence ? et lorsque le travailleur est surpris par la disette à côté de son produit refusé, n’est-ce point aussi que la loi de solidarité est violée ?…

Je répète mon dilemme : ou l’Économie politique est une dérision, et ceux qui l’enseignent sont des menteurs : ou bien elle a pour objet de centraliser les forces industrielles, et de discipliner le marché.

391. Faut-il que je le dise ? Au lieu de suivre le fil de ces équations, les économistes ont accepté comme pièces probantes, comme lois fatales et absolues de la société, les innombrables accidents de non-valeurs amenés par la lutte des fabricants, par l’insuffisance de la consommation et l’imprévoyance des producteurs : et ils se sont appliqués à trouver des recettes de précaution contre toutes les chances. De là leurs spéculations interminables sur l’offre et la demande, double élément, selon eux, de la valeur, et principe régulateur du commerce. Dans la plupart des livres d’économie