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qu’était en 1789, ce qu’a été depuis la Révolution l’idée bourgeoise. Le lecteur pourra juger ensuite, en parfaite connaissance de cause, de quel côté est aujourd’hui la capacité politique, si elle est dans la Démocratie travailleuse, ou dans le capitalisme bourgeois.

Après avoir constaté précédemment (2e partie, chap. ii) que la conscience bourgeoise avait atteint son plus haut degré d’intensité en 1789, alors que le Tiers-État, jetant par la bouche de Sieyès le défi à l’ancien régime, disait de lui-même : Que suis-je ? rien ; Que dois-je être ? tout, nous avons fait observer que, la bourgeoisie étant en effet devenue tout, mais que, rien alors ne la différenciant plus dans le corps social, elle avait commencé à perdre le sentiment d’elle-même, et qu’elle était tombée en léthargie. Nous avons remarqué que si, en 1848, après la chute de Louis-Philippe, elle avait paru sortir de sa torpeur, c’était grâce à l’insurgence des classes ouvrières, qui, se séparant ou plutôt se distinguant d’elle, ayant acquis conscience d’elles-mêmes et de leur destinée, faisaient leur entrée sur la scène politique ; c’était en un mot grâce à la terreur socialiste.

Mais une chose plus triste encore que cette chute de la conscience dans la moyenne et haute bourgeoisie, c’est qu’à la différence des classes ouvrières dont l’ascension est si rapide, la bourgeoisie n’a plus même l’intelligence de l’Idée qui jadis la gouvernait ; et qu’en tant que le Pays et le Gouvernement peuvent être considérés comme étant dans sa dépendance, ils sont, par l’effet de sa profonde nullité, à la merci de la fortune. Or, ce qui constitue la capacité politique n’est pas seulement la conscience, c’est aussi l’Idée ; et la bourgeoisie, si elle savait encore lire et penser, ne serait